L'ASTRILD À JOUES ORANGE (Estrilda melpoda)




LA DEUXIÈME GÉNÉRATION :


En août 2000, toute notre petite famille ailée a emménagé avec nous en région parisienne. J'attendais encore à l'automne 2000 la naissance d'une deuxième génération viable d'Astrilds à joues orange. J'ai été confrontée, cette année-là, à une manque de fécondité dû à l'âge d'une des femelles (7 ans) et à l'embonpoint d'un des deux jeunes mâles...

En 2001, pleine d'espoir de voir naître des petits Joues orange, avec les deux nouvelles femelles importées acquises en juin et septembre 2000, je n'ai pu offrir aux oiseaux la possibilité de nicher que fin mai. En effet, la construction d'une grande volière dans le salon nous a pris beaucoup de temps. Manque de chance, si certains couples nouvellement arrivés ont niché tout de suite, les Astrilds à joue orange n'ont même pas fait mine de transporter des matériaux.

Alors arriva 2002. La volière fut garnie de nombreuses plantes, les sites de nidification au sol étaient entièrement squattés depuis l'été 2001 par les trois couples d'Astrilds cendrés, et nous avons confectionné un "mur pour nids" en grillage camouflé de branches de sapin à l'attention des oiseaux...

Dès les premiers jours de mars, les Joues orange ont commencé à construire des nids. Certains se sont remplis d'oeufs minuscules qui n'ont jamais éclos... D'autres, mal arrimés sur leur support végétal, sont tombés pendant l'incubation... Certes cette année-là, il y avait des tentatives, mais peu fructueuses. Jusqu'au mois de mai, aucune éclosion de Joues orange !

Après ces tentatives ratées, les deux couples en condition de reproduction (dont les mâles sont deux oiseaux nés à la maison en 1998) se sont mis au repos...

Début juillet, la femelle de l'un de ces couples se fait rare... Quelques jours plus tard, je la surprends avec la queue tordue en forme de "boomerang" : elle couve dans un nid bien ajusté ! Ce n'est que plusieurs jours après que je découvrirai où se trouve ce fameux nid : à 1,50 m de hauteur, soigneusement tissé dans le grillage du "mur pour nids", derrière une branche de sapin, à l'aide de fibre de coco et de quelques brins d'herbe. L'espoir renaît ! L'entrée du nid, en tunnel, n'est pas facile à atteindre...

Nid naturel de Joue orange, et femelle
Femelle près du nid
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La veille de notre départ en vacances, le 20 juillet, je fais une petite visite du nid : cette fois-ci, les oeufs minuscules et chauds se sont transformés en oisillons tout doux. Je caresse à l'aveuglette les petits du bout du doigt, en essayant de les compter : je dénombre 5 à 6 "bosses", qui s'avèreront être 3 oisillons, chacun étant muni d'une tête et d'un corps qui constituaient ces fameuses "bosses" dans le nid. J'ose sortir l'un de ces petits, qui paraît âgé de 3 à 4 jours seulement. Son jabot est rempli d'une bouilllie jaune à base de pâtée d'élevage et d'insectes prédigérés par les parents. Il semble très à l'aise, je le prends en photo dans ma main... Voyez comme sa peau est claire, toute rose ! Les papilles réfléchissantes blanches ressemblent fort à celles des petits Astrilds cendrés. Les parents, admirables, retournent s'occuper de leurs petits dès que mon intrusion est terminée.

Oisillon Joue orange
Oisillon Astrild à joues orange (Estrilda melpoda) âgé de quelques jours
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Notre ami Hervé nourrit les oiseaux en notre absence, qui dure 3 semaines. En éleveur chevronné, il m'a demandé de lui laisser les bagues pour identifier les jeunes qui viendraient au monde durant nos vacances. Chaque jour, l'eau de boisson est renouvelée consciencieusement. L'eau du bain est fournie par une fontaine de fabrication "maison", il suffit de rajouter de l'eau quand les oiseaux en ont trop fait sortir en s'éclaboussant joyeusement.

Fontaine de volière intérieure
La fontaine-baignoire
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Des quantités de mini vers de farine, de vers buffalos et de pinkies sont distribuées avec générosité aux parents qui nourrissent leurs petits. Une pâtée d'élevage "maison" faite à base de produits du commerce est consommée régulièrement par les reproducteurs. Vous pouvez lire ma recette de l'été 2002 en cliquant ici. Je donne également de la pâtée pour oiseaux insectivores, là encore en mélangeant plusieurs marques quand je peux. Cela me permet, en outre, de passer progressivement d'une marque à une autre sans trop perturber les goûts des oiseaux. La pâtée pour insectivores n'est pas consommée par mes Astrilds avec autant d'enthousiasme que la pâtée d'élevage dite "aux œufs". Les grappes de millet chinois jaune et rouge ont été accrochées un peu partout dans la volière, en supplément des mélanges de graines "spécial astrilds" et "spécial diamants océaniens" confectionnés par mes soins à partir de graines achetées au détail, et distribués dans des mangeoires en matière plastique à 3 endroits différents de la volière.

Mâle sur la table de nourrissage
Mâle à la table de nourrissage
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Lorsque je suis présente, j'ajoute fréquemment des rondelles de concombre ou de courgette, un peu de nectar pour colibris ou de bouillie pour loris, et en été, des brassées de graminées mi-mûres en épis, dont les préférées sont les sétaires vertes, c'est-à-dire les "millets en grappes sauvages", cueillis avant le jaunissement et la chute des graines sortant de leurs épillets. Ces herbes folles poussent presque partout et une fois qu'on sait les reconnaître, on en remarque dans les endroits les plus inattendus... Je prépare aussi des graines germées.

Durant nos vacances, bien sûr, je n'ai pas infligé la distribution de verdure, graines germées et nectar à mon ami éleveur, que j'appelle volontiers mon "Piafs Sitter". Les oiseaux ont besoin avant tout d'insectes pour élever leurs petits dans les premiers jours de leur vie. La ration quotidienne apportée par Hervé convient tout à fait. A notre retour, 6 jeunes oiseaux volettent avec leurs parents : deux Astrilds à joues orange, et quatre Bengalis rouges. Le troisième Joue-orange, hélas, s'est échappé dans la pièce à l'insu de son soigneur le matin précédant notre retour, et il est allé mourir de faim ou de stress sur le toit de la volière, tout près de ses parents impuissants. Mais entre temps, les jeunes Joues orange ont été bagués au nid à l'âge de 10 jours, avec des bagues de 2,2 mm de diamètre qui peuvent paraître grandes pour cette espèce, mais ne ressortent absolument pas de la patte des oiseaux à présent adultes. Les parents n'ont eu aucune mauvaise réaction suite au baguage de leurs petits.


QUELQUES CONSEILS AUX ÉLEVEURS DÉBUTANTS :


Un point que je voudrais souligner ici est la brutalité de la mue des jeunes Joues orange (comme pour les Becs de corail, d'ailleurs). Cette mue intervient après le sevrage, vers l'âge de 6 semaines, et amène les oiseaux d'un plumage juvénile brun à joues à peine orangées avec un bec noir entouré des papilles blanches des oisillons, au plumage adulte : bec rouge sans papilles, joues orange vif, dessus de la tête gris-bleu, ventre lavé d'orange. Cette mue se manifeste par une chute de plumes massive, par poignées, en plusieurs endroits du corps, principalement les petites plumes duveteuses qui permettent à l'oiseau de maintenir sa température interne. L'oiseau a l'air "mité", certains éleveurs déplorent sa laideur à cette période-là. Le bec noir vire petit à petit au rouge vif. Il est évident que cette mue vers le plumage adulte fatigue considérablement les jeunes oiseaux et qu'ils doivent être aidés à ce moment-là par un apport de vitamines, acides aminés soufrés (aidant à la constitution du nouveau plumage), sels minéraux et oligo-éléments, faute de quoi ils pourront être plus sensibles aux maladies comme la lankesterellose, qui survient précisément à cette période-là.

Il faut aussi tenir compte du fait que les jeunes Joues orange suivent leurs parents pour chercher de la nourriture au sol même si on met des mangeoires en hauteur, ce qui peut accentuer les risques de contamination par des germes présents dans une litière humide ou dans les fientes tombées par terre. Une bonne hygiène est la meilleure des préventions, mais dans une volière commune où chaque oiseau vit sa vie comme il l'entend et où l'on ne nettoie pas le fond de cage tous les jours, il faut penser à ces moments critiques et soutenir les oiseaux en enrichissant l'alimentation. Eviter toute carence permet déjà de ne pas avoir d'oiseaux inutilement affaiblis. Si l'on décèle une maladie déclarée chez l'un d'eux, il est de la responsabilité de l'éleveur de faire le nécessaire pour soigner ses oiseaux. On peut être contre les abus de médicaments préventifs (et je le suis), faut-il pour cela laisser mourir tous les malades sans rien faire lorsque la maladie est curable ? Que chacun en décide comme il l'entend !

A l'issue de cette mue, qui dure environ un mois, les jeunes oiseaux sont très colorés et l'on peut commencer à distinguer les mâles des femelles. De plus, les jeunes mâles commencent à gazouiller dès que leur mue est finie et qu'ils sont en pleine forme. Leur apprentissage du chant est un peu difficile au début pour les oreilles sensibles aux fausses notes, mais très rapidement, ils maîtrisent cet atout de séduction et nous en font largement profiter. On peut supposer qu'il ne faut guère plus de temps à un jeune astrild dans la nature pour être sexuellement mature et entamer sa première reproduction. En captivité, on remarque que l'oiseau continue à grandir légèrement au cours de sa première année, voire de ses deux premières années, et il vaut mieux attendre que l'oiseau soit âgé d'un an pour lui faire entreprendre une couvée. Ceci est surtout valable pour les femelles, pour qui la ponte des œufs est une grosse épreuve à chaque fois.

Après une couvée réussie, si la mue de fin d'été ne vient pas les interrompre, les parents Joue-orange entreprennent une seconde nichée. Deux nichées réussies par an sont déjà une excellente moyenne, il vaut mieux ne pas être trop "gourmand" et ne pas obliger ses oiseaux à nicher sans cesse, au risque d'épuiser les femelles, mais aussi les mâles, qui ont un rôle très actif dans la construction du nid et l'élevage des petits. Même chose si les oiseaux ne font que des pontes claires ou n'élèvent pas leur jeunes jusqu'au bout : 3 couvées par an réussies ou ratées doivent représenter un grand maximum.

A noter aussi que les femelles reproductrices ont parfois le bec qui se décolore lors de la ponte. Ceci peut dénoter une carence que l'on doit essayer d'enrayer à l'aide de compléments vitaminés. Une fois la reproduction terminée, je pense qu'il faut faire le maximum pour remettre les oiseaux sur pied s'ils paraissent fatigués, faute de quoi il est inutile d'envisager de nouvelles saisons de reproduction pour eux.


L'AVENIR DE L'ASTRILD À JOUES ORANGE EN CAPTIVITÉ :


Comme tous les oiseaux exotiques importés, cet oiseau se trouve encore dans les animaleries en Europe, mais de moins en moins facilement et les prix de vente observés dans le commerce sont en augmentation constante. Ceci est dû à la loi européenne de novembre 2001 sur les quarantaines obligatoires des oiseaux importés dans la CEE qui a nécessité, paraît-il, des aménagements coûteux pour les importateurs directs.

D'autre part, l'Astrild à joues orange est inscrit à l'annexe III de la Convention de Washington, ce qui signifie que sa circulation est libre, mais le flux des captures/exportations est soumis à des quotas définis chaque année. Pour information, le Sénégal, qui est le principal pays exportateur d'Astrilds à joues orange, a défini les quotas d'exportation suivants pour ces dernières années :

- 1997 : 100 000 spécimens
- 1998 :  50 000 spécimens
- 1999 :  50 000 spécimens
- 2000 :  50 000 spécimens
- 2001 :  50 000 spécimens
- 2002 :  32 000 spécimens

Inutile d'être un grand savant pour comprendre que si les amateurs européens ne se mobilisent pas massivement dès aujourd'hui pour faire reproduire cet oiseau en volière et le domestiquer avant que les exportations soient complètement arrêtées, nous n'en verrons plus en Europe dans quelques années. Comme chacun sait, l'Australie a interdit en 1960 les exportations de ses animaux vers le reste du monde, mais également les importations du reste du monde vers son territoire. Le résultat est là : les éleveurs ont réussi à conserver des souches d'astrilds élevés en captivité, mais peut-être pas assez, car leur prix de vente est devenu astronomique. Argent et amour des oiseaux ne font jamais bon ménage... A nous d'éviter ces abus et de rester de vrais amateurs d'oiseaux, pas d'euros !

Je conclus provisoirement ici ce chapitre sur mon oiseau favori. Vous aurez pu remarquer en lisant ces lignes que s'il semble commun et rustique lorsqu'on veut juste le garder sans reproduction pour le plaisir des yeux, ce joli Joue orange n'est pas des plus faciles à faire reproduire. Mais ce n'est pas non plus le plus difficile, heureusement, et cela vaut vraiment la peine de lui donner sa chance d'élever une famille. Les éleveurs doivent se connaître pour améliorer leurs techniques d'élevage, faire des échanges de jeunes oiseaux et éviter ainsi la consanguinité.

La dernière page de cet article donne quelques recettes que j'utilise avec mes propres oiseaux. Vous pouvez retrouver l'histoire, les photos et les chants de mes oiseaux sur le site Internet http://www.astrild.com/.

Article publié le 27 septembre 2002


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